Ce vendredi après-midi, je me suis rendu au chemin des… morts. Drôle de nom pour un sentier bucolique qui mène de Leers-Nord (Belgique) à Leers (France). L’explication remonte bien avant l’existence de la Belgique, lorsque les habitants de Leers-Nord devaient emprunter ce chemin pour enterrer leurs défunts au cimetière qui se trouvait de l’autre côté de ce qui allait devenir la frontière franco-belge. « Un sentier d’au moins 240 ans à valeur historique et patrimoniale », m’a certifié le riverain qui m’a convié là-bas. Mais ce n’est pas pour parler du patrimoine local que je me suis rendu au chemin des morts. Le riverain voulait dénoncer la disparition du sentier… recouvert de terre et cultivé – enterré, si on peut dire – par le cultivateur des parcelles voisines. Plus possible pour les promeneurs et les joggeurs de l’emprunter pour gagner la France. Le citoyen en question, un alerte quinquagénaire en tenue sportive, a alerté la commune et le conseiller écolo du coin.Il a même déposé plainte auprès de la police. Il va probablement obtenir gain de cause car l’agriculteur a été mis en demeure par la commune de remettre ce sentier en état.
Étonné par la détermination de certains citoyens, mais parfois agacé
Je suis toujours étonné par la détermination de certains citoyens, souvent retraités ou proches de la retraite, à défendre leur patrimoine local. Ici un sentier, ailleurs un arbre élagué par les services communaux ou un coin de campagne « menacé » par la réalisation d’une dalle de compostage, la construction d’une éolienne ou d’un mât de télécommunication. Étonné, souvent admiratif, mais parfois aussi, je ne le cache pas, agacé, car le « partout ailleurs, excepté dans mon jardin » – le fameux syndrome Nimby (Never in my backyard) – n’est jamais très loin. D’accord pour les GSM, mais surtout pas d’antenne près de chez moi. Ok pour les énergies renouvelables, mais pas d’éoliennes qui gâchent la vue depuis mon jardin. D’accord pour des rivières propres, mais surtout pas de station d’épuration au bout de ma rue.
Il m’arrive de me poser des questions quant au rôle du journaliste qui sert d’amplificateur ou de caisse de résonance à des revendications particulières contre un intérêt collectif. N’a-t-on pas tendance à se précipiter? Ce n’est nullement le cas, je le précise, de mon riverain du chemin des Morts dont le souci, n’a-t-il cessé de me répéter, est avant tout patrimonial et historique. D’ailleurs, m’a-t-il fait remarquer dans un haussement d’épaules, les autres riverains s’en foutent… Ils font le mort.