Comme tous les Belges, j’ai été très fier de l’attribution du prix Nobel de physique au professeur de l’Université Libre de Bruxelles François Englert pour la découverte du boson scalaire, le père en quelque sorte des particules élémentaires, baptisé, de manière un peu caricaturale, par la presse « la particule de Dieu ». L’événement permet de donner un coup de projecteur sur un domaine méconnu du grand public : la recherche fondamentale.
J’ai été surtout séduit par la modestie et la sagesse avec lesquelles ce brave grand-père de plus de 80 ans a accueilli la nouvelle. J’épingle quelques phrases lues dans le journal « le Soir ». Tout d’abord, il a refusé, gentiment, d’expliquer en deux minutes l’objet de sa découverte à un journaliste que le lui demandait : « cela prend des années d’études. Je ne veux pas tromper les gens, je veux expliquer le monde, pas le caricaturer ». Quel pied de nez à l’air du temps qui veut tout, vite et tout de suite. Le physicien n’oublia pas de remercier celui avec qui il partagea cette découverte Robert Brout, hélas décédé depuis. Il insista sur l’importance de la recherche fondamentale parfois remise en question parce qu’elle prend son temps et du temps sans perspectives économiques à court terme : « la liberté de chercher est essentielle et la recherche fondamentale est cruciale pour déboucher sur des recherches appliquées. Elle fait appel à notre créativité et si on la bride en exigeant des perspectives à court terme, elle ne va devenir qu’une copie démodée, elle va bégayer et s’assécher. Elle va foirer. »
François Englert dit encore « ne pas avoir de conseil à donner sinon de choisir de faire ce qu’on aime et qui a du sens ». Avec une très jolie phrase à la clef: « Je n’ai jamais eu l’impression de travailler, mais d’exercer une passion, celle de donner un caractère intelligible au monde qui nous entoure ». Aiguiser la curiosité, favoriser la connaissance et partager le savoir: les plus belles armes, sans doute, pour lutter contre l’intolérance, qui est le plus souvent le fruit de l’ignorance. Ce n’est pas pour rien que Mira, l’épouse du prix Nobel, eut cette belle réflexion qui peut paraître naïve mais qui n’est pas sans fondements: « La communauté des scientifiques est formidable. Si le monde entier était comme eux, il n’y aurait pas de guerre sur la Terre ».